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lundi 30 juin 2025

La Bête du Gévaudan, entre superstition, terreur et bêtes tueuses

En cette deuxième moitié du XVIIIe siècle, si à la cour de Louis XV, le siècle est «des lumières», le Gévaudan (la Lozère actuelle) est une province pauvre et isolée aux landes battues par les vents qui se caractérise par des sols ingrats, un climat rigoureux, des voies de communication inexistantes ou en mauvais état, un pays de petits bergers et de loups, mais aussi de paysans vivant dans une grande misère, mais en quasi-autosuffisance avec l’élevage d’ovins et bovins, la culture du seigle et de fourrage, les potagers, au cœur de la Lozère, où la religion est omniprésente pour un peuple hanté les superstitions et la peur du diable. Dans cette ruralité austère, les curés de campagne jouaient un rôle essentiel en tenant les registres paroissiaux. C’est alors qu’une Bête répand la terreur, elle aurait commis ses ravages dans le Dauphiné entre 1762-1763 avant de migrer vers Langogne, elle serait des loups venus d’Allemagne qui auraient pris goût à la chair humaine durant la guerre de Sept ans en dévorant les cadavres, puis en attaquant et en dévorant les blessés dans les champs de bataille.

 


Au printemps 1764, une femme est attaquée près de Langogne, en Gévaudan, par une «bête» que ses bœufs parviennent à mettre en fuite, même si elle a attaquée des hommes avant. Le 30 juin 1764, une petite bergère, Jeanne Boulet est tuée et dévorée. Durant l’été, les victimes s’allongent, ce sont des enfants ou des jeunes gens, le plus souvent des filles. Il s'agit généralement d'individus occupés à garder les troupeaux. Parmi ceux qui l’ont vue, personne n’a reconnu un loup lors des attaques mais pour autant il n’y a pas eu non plus de description fantasmagorique donnée par les gens du Gévaudan à l’époque, ils évoquaient une bête qui ressemble à un loup, mais avec une tête plus allongée, une gueule énorme, une raie noire sur le dos. Ce qui les a étonnés, c’est qu’en temps normal, le loup ne s’attaque pas à l’homme. Il dévore des animaux de la ferme, de jeunes agneaux, de jeunes veaux. Là, surprise, non seulement, le loup continue à manger du gibier et des animaux de basse-cour, mais il s’attaque à des humains et notamment à de jeunes enfants, qui étaient une proie relativement facile. Cela s’explique parce que les enfants de cette époque n’avaient pas la taille des enfants d’aujourd’hui, ils étaient beaucoup plus petits. La Margeride était une région de malnutrition. Ces enfants étaient chétifs, malingres, c’était une proie toute désignée pour les loups anthropophages. Des battues sont organisées à l’initiative de Lafont, subdélégué de l’intendant du Languedoc, mobilisant des centaines, voire des milliers de paysans et de chasseurs, aux environs de Langogne, dans la forêt de Mercoire, etc., mais la Bête se moque des chasseurs, attaquant le soir des chasses, en dehors des zones de battues. L’inefficacité répétée des autorités qui avec plus ou moins de bonheur et de bonne volonté, elles tentent de se coordonner pour courir sus aux agresseurs et les neutraliser, mais leur insuccès chronique ajoute à la fabrication du mythe de cette insaisissable Bête du Gévaudan. Lafont propose aussi l’armement des paysans et le regroupement des pâturages pour éviter que les bergers ne fussent seuls. Bientôt l'animal féroce, pourchassé, quitte les parages de Langogne, s'en va vers l'ouest. À partir de là (automne 1764), les ravages ne cessent de s'étendre : chaque mois ou presque, plusieurs personnes (enfants, adolescents, femmes et vieilles femmes) sont égorgées et dévorées en Gévaudan et dans le sud de l'Auvergne. Une bête qui est partout et nulle part, qui tue puis se volatilise. On convient même que l'assassin a sans doute des complices aussi étranges que lui; on relève des traces bizarres, des types d'attaque inouïs, des malices clairement intentionnelles. Les responsables politiques locaux ne parvenant pas à mettre fin à ces attaques de jeunes filles, l’un d’eux s’est décidé à écrire à Paris pour expliquer qu’un monstre s’attaquait à la population. De toute évidence, la bête n’existait pas, mais pour sauver la face, les aristocrates ont exagéré les choses, racontant que la bête était énorme, qu’elle faisait trois mètres de long. Les paysans ont gobé cette histoire, cela les arrangeait aussi parce qu’ils avaient besoin d’aide et voulaient de l’argent et des armes pour combattre la créature. En outre, l’actualité n’était pas très riche à l’époque. Le royaume compte alors quelque 20 000 loups mais le drame du Gévaudan intervient opportunément pour la presse, en mal de ventes après la guerre de Sept Ans. Ainsi, le Courrier d'Avignon puis La Gazette de France et les gazettes internationales s'emparent de l'affaire et, en quelques mois, publient en feuilleton des centaines d'articles alimentant l’hystérie. La presse colporte volontiers les ragots, articles et illustrations sensationnalistes, à une époque où l’actualité est creuse. Les imagiers les plus inventifs firent découvrir son image le plus souvent fantasmée, et les courriers iconoclastes de M. Labarthe ne viennent rien arranger. L’opinion publique découvre qu’il y a une province qui s’appelle le Gévaudan. 

 

Après douze attaques, des dragons mené par le capitaine Duhamel envoyés par De Moncan, gouverneur du Languedoc, sont lancés à la poursuite de l'animal féroce à partir d’octobre 1764, mais le traumatisme fait tache d'huile, la rumeur renforce l'horreur. Dépassant rapidement le fait divers, la Bête du Gévaudan donne naissance à toutes sortes de rumeurs et croyances à l'époque, tant sur sa nature — perçue tour à tour par les contemporains comme un loup, un animal exotique, un «sorcier» capable de charmer les balles, voire un loup-garou — que sur les raisons qui la poussent à s'attaquer aux populations, en novembre, elle aurait déjà dévoré une vingtaine d’enfants «avec une préférence pour les fillettes», et les bûcherons n’osent plus entrer dans la forêt, si bien que le prix du bois a augmenté, après une battue massive, le 22 décembre, rien ne semble pouvoir l’arrêter, pas même les balles des soldats, l'évêque de Mende, monseigneur Choiseul-Beaupré énonce alors un «châtiment divin» le 31 décembre 1764 dans son mandement à l’époque des philosophes qui ont détourné les ouailles de Dieu, et l’évêque se donne aussi pour mission de mettre en œuvre un catholicisme «de combat», en raison de la présence marquée du protestantisme cévenol dans son diocèse de Mende. Dès l'hiver 1764-65, la Bête sévit dans les limites des départements de la Lozère, du Cantal et de la Haute-Loire, englobant les secteurs de Saint-Flour, Saugues et Marvejols. Elle demeure plus ou moins dans ce périmètre jusqu'à sa disparition. La violence des blessures marque les esprits et provoque l'effroi. Les morsures sont impressionnantes, les habits déchiquetés, les membres arrachés et les têtes parfois décapitées. Toutefois, l'animal s'introduit dans les villages, allant même jusqu'à porter ses agressions dans les cours des habitations. Autre fait marquant, les agressions sont courantes, répétitives; les autorités allant même jusqu'à en signaler plusieurs sur une même journée. La plupart du temps, les victimes succombent, rares sont celles qui survivent. Les gens ne disposent que de moyens rudimentaires pour se défendre, surtout les enfants. Ceux qui parviennent à échapper à la mort ont été le plus souvent secourus à temps ou sont armés d'objets plus efficaces comme des fourches ou des petites baïonnettes. Les esprits sont troublés par cette créature dont on ne réussit pas à définir véritablement l'identité, qui s'attaque aux populations sans aucune crainte et avec sauvagerie, et surtout qu'on ne parvient pas à tuer. Quelques individus, abrités par les ravages d'un monstre authentique, ajoutèrent-il à ses forfaits d'autres crimes entachés de sadisme ou se livrèrent à des plaisanteries de mauvais goût. Face aux agressions, certains réagissent de manière héroïque et parviennent parfois à blesser la "bête féroce" mais les coups portés ne semblent être d'une quelconque efficacité, tel le jeune Portefaix, 12 ans, qui réussit à chasser l’animal pour sauver un plus petit que lui le 12 janvier 1765. Nombre de témoignages rapportent des coups de fusils tirés dans sa direction sans pouvoir tuer l'animal. Duhamel qui donne un portrait extraordinaire de la Bête le 20 janvier pour expliquer ses échecs, va se démener tant bien que mal jusqu’en mars 1765 organisant d’autres battues gigantesques dont les plus importantes le 7 et 11 février, arme les paysans, pose des pièges et empoisonne les cadavres de victimes (sachant que les animaux reviennent souvent finir les restes d'une proie) et déguise ses hommes en femme le 20 février, mais la liste des victimes ne cesse de s’allonger et la bête s'adonne à une véritable mise en scène, torture les chevreaux pour débusquer un berger qui arrive à la chasser, la vieille des cadavres et même l’empoisonnement des corps n’ont pas plus de succès, mais la population ne voit pas d'un bon œil les dragons dans leur région et doute de leur efficacité, tandis que la peur a gagné beaucoup d'esprits et Duhamel se plaint de la couardise des paysans, car «sa ruse étonne si fort le paysan que c'est une opinion générale chez eux qu'il y a là dedans quelque chose de surnaturel et souvent même il est entretenu dans cette idée par gens lettrés en qui il a confiance», mais il s’est aussi froissé avec des notables qui s’en sont plaint aux autorités locales, l’inefficacité de ses chasses et les dégâts collatéraux causés par les chevaux aux maigres récoltes, ou aux terres ensemencées, s’ajoutant au mécontentement causé par l’indiscipline et les abus de la troupe sont tout autant de mauvais points à son encontre. Pendant ce temps, Jeanne Jouve le 13 mars fait preuve d’un acte de bravoure pour sauver ses enfants. La Cour reçoit également des représentations de la Bête diffusées en Gévaudan.

 

Louis XV mécontent de l’insuccès des dragons envoie dès le mois de février un chasseur de loup réputé venu de Normandie, Marc-Antoine Vaumesle d’Enneval accompagné de son fils est envoyé en renfort pour traquer «la Bête» arrivent à obtenir avec l’aide de M. de Saint-Priest la disgrâce du capitaine Duhamel qui a continué de chasser de son côté après qu’il a essayé de chasser en vain avec lui. En mars, Jeanne Jouve doit lutter pour protéger ses trois enfants, et son acte de bravoure sera récompensé par le roi. Commençant à tâter le terrain entre février et mars pays, n’y voyant qu’un loup, leurs chiens sont soigneusement tenus en laisse, il la chasse à l’affut en avril au moment où les dernières attaques de la les meurtres des 3, 4, 5, et 8 avril 1765 se cantonnent dans une autre zone de la Margeride, à une cinquantaine de kilomètres plus au sud, selon un trajet plutôt cohérent : Fontans, Saint-Denis, Arzenc de Randon, Chaudeyrac, en dehors du meurtre de Gabrielle Pélissier le 7 avril 1765, à La Clauze, dont la rumeur gonflera la découverte de son corps, et suite à de nouvelles attaques spectaculaires au printemps 1765, l’histoire de la «Malbête» se répand dans toute l’Europe, l’impuissance du pouvoir royal étant tournée en dérision, il apprend le 22 avril que la Bête est accompagnée d’une louve, puis il revint aux battues en en faisant des générales entre le 30 avril et le 23 mai (Il y en aura 6 en avril, 5 en mai), mais il ne peut la débusquer et l’abattre malgré ses chiens limiers, la pluie, la grêle et le brouillard même en été est un handicap, la Bête se dérobe toujours et poursuit ses attaques, le reste du temps les d’Enneval se rendent sur les lieux d'une attaque signalée, la peur des paysans en vue de la Bête lors des battues est un poids supplémentaire, comme les bassesses de ceux qui ne recherchent que les honneurs notamment comme le sieur de La Védrines en mars qui tira sur un gros chien en mars et prétendit que c’était la Bête, et les Chastels témoins de la scène ne confirmèrent pas ses dires, et des paysans qui déguisent une louve tuée à La Panouze pour recevoir la prime le 23 avril, cependant, malgré cela ils peuvent compter sur l’aide qu’ils reçoivent parfois de nobles locaux, tel le marquis d’Apcher, et de chasseurs venus de la France entière, et même si l’espoir vint un moment avec la blessure faite par M. Marlet de Chaumette à la Bête le 1er mai, et même s’il n’y aura pas d’attaques entre le 2 et le 18 mai, les battues reprennent, quelques loups sont tués, quelques bergers attaqués, les apparitions de la Bête se multiplient, mais personne ne parvient à la tuer. Parallèlement, des primes importantes sont offertes pour la mort de la Bête, bien que l'on répugne à armer les paysans. Rien ne fonctionne, malgré les tentatives d'empoisonnement des corps. En plus de cela, d’Enneval est gêné par les pièges multiples, quelquefois farfelus donnés par des inventeurs à l'évêque de Mende et aux intendants suite à un afflux de courrier qu’il se refuse à prendre à sérieux (à raison). Ils sont aussi de mauvaises relations avec la noblesse locale et plus particulièrement avec le Comte de Morangiès qui écrit sur eux une missive incendiaire le 3 mai, mais les d’Enneval se plaignent de ce fait le 23 mai. De plus, ils souhaitent armer les paysans, ce que les classes supérieures refusent énergiquement, pendant ce temps, la crise ne cesse de s’aggraver. Le roi est d’ailleurs constamment informé de leurs insuccès alors qu’ils ont réussis à bloquer la Bête dans la zone des Trois monts à force de battues faites en juin et tente de la coincer, de la comprendre et de la mettre hors d'état de nuire, mais la Bête continue de tuer et le 21 juin, elle fait trois morts. Le décompte macabre s’alourdit : on déplore 40 nouvelles victimes au mois de juin 1765, s'ajoutant aux 21 premières déjà recensées.

 

La Bête dévoreuse, qui semble invincible, va même humilier le roi Louis XV, devenu la risée de l’Angleterre… Ce dernier, pour triompher de la Bête, envoie en Gévaudan son premier porte-arquebuse, monsieur Antoine, avec l'élite des gardes du royaume et les meilleurs chiens des équipages du roi, qui s'alarment et découvrent une vieille géographie de la férocité qui s'étend bien au-delà du Gévaudan alors que la Bête en est déjà à 59 morts et une trentaine de blessés. Antoine et ses hommes se joignent à d'Enneval lors de différentes chasses. Cependant, la Bête dont les attaques semblent se concentrer davantage entre Gévaudan et Auvergne autour de Saugues et d’Auvers, se joue de ses astuces, des chasses qu’il mène comme des battues auxquelles il doit maintenant recourir entre juin et septembre 1765 qui connaissent également l'insuccès, et elle fait aller à droite à gauche, comme le 6 juillet, puisqu’il vint à Broussoles «à l’occasion du meurtre d’une fille arrivé le 4 juillet», Marguerite Oustalier, une paysanne de soixante-huit ans, puis du 15 au 16 et du 20 au 21 juillet, il coucha à Paulhac, où la Bête avait été aperçue, ensuite le 23 juillet, deux gardes se rendirent à La Bessière, non loin d’Auvers, où la Bête avait fait une victime, puis le 6 août, deux autres passèrent la nuit au Malzieu en revenant du village de Marcillac, où des bergers avaient été attaqués, et il ne peut pas non plus avoir à ses côtés d’Enneval congédié le 18 juillet à causes de nobles locaux ayant eu sa tête qui sera bien reçu à Versailles par le roi, et monsieur Antoine a le droit à l’altercation entre la famille Chastel et deux de ses gardes-chasses le 16 août, et les bassesses locales sont visibles le 4 septembre, puisque monsieur Antoine alla à Saint-Flour, où des paysans avaient tué un loup dans l’espoir de toucher la récompense promise, il découvre aussi avec horreur qu’un chien de berger dévorait un cadavre. Les Chastels auront le droit d’un emprisonnement limité à la seule durée du séjour de monsieur Antoine. Ce dernier, après avoir arrêté les chasses à la mi-août à cause du mauvais temps, a un peu d’espoir, car il reçoit également le secours du comte de Tournon, gentilhomme d'Auvergne le 2 août, quand Marie-Jeanne Valet blesse la Bête le 11 août, et après que le garde Rinchard a tué un gros loup le 29 août, mais dès le 2 septembre, une jeune fille est attaquée à Desges, et qu’un teinturier, nommé Bodet, ses deux muletiers, sont chargés par la Bête qui est touché par un coup de fusil le 11 septembre, et il reçoit le secours de 2 valets et 12 chiens le 15 septembre, réussit en effet, le 20 septembre 1765, à tuer un loup énorme puis une louve et deux louveteaux quasiment gros comme des vaches ont été abattus, une fois l'animal empaillé et apporté à Versailles, malheureusement, la dépouille a été détruite. Elle a été conservée jusqu'en 1810, 1815, puis elle a été brûlée notamment parce qu’elle était très abîmée, enfin, les journaux et la Cour se désintéressent de l'affaire, et les carnages cessent trois mois.

 

Puis ils reprennent, loin des cérémonies qui reconnaissent (en 1770 encore) la triomphante victoire du porte-arquebuse royal sur la Bête, un jeune berger est attaqué près de Marcillac, et d’autres personnes sont blessées ou tuées durant l’automne, et le 21 décembre 1765, une autre jeune fille, Agnès Mourgues est dévorée à Lorcières, et tout recommence, sauf que les loups dits «enragés», seuls ou en meute, hélas banals mais qu'on sait traquer, vont relayer et dissiper en 1766 la peur de la Bête au dos rayé de noir… Les autorités locales en appellent au roi, mais ce dernier, convaincu qu'Antoine a abattu la Bête du Gévaudan, refuse d'intervenir et interdit à la presse d’en parler. L’affaire doit donc être réglée localement, le subdélégué Lafont est donc contraint en 1766 de conduire les chasses avec des moyens limités et l’aide de quelques nobles locaux comme le marquis d'Apcher, tend des pièges, empoisonne les cadavres et organise des battues, alors que l’animal aurait blessé et «dévoré plusieurs personnes», et la presse ne donne que quelques informations éparses des attaques de la Bête entre 1767, car la liste des victimes s’allonge encore. On en comptera encore seize jusqu’à la fin présumée de la Bête. Les dernières attaques ont lieu sur un territoire plus réduit, près des villages blottis contre le Mont-Mouchet et le Mont-Chauvet, sur la Margeride. Des pèlerinages sont alors organisés à Notre-Dame d’Estours et à Notre-Dame de Beaulieu pour demander à Dieu la fin des massacres. Finalement, en juin 1767, au cours d'une battue diligentée par le marquis d’Apcher, sur la Sogne d'Auvers, sur les pentes du nord du mont Mouchet, un chasseur-braconnier, Jean Chastel, tue un autre grand loup au poil rouge avec un écart de mâchoires de deux pans, c'est-à-dire 45 centimètres. Une fois tué, la Bête a été promenée de village en village, puis emporté à la Cour pour être montré au roi. Dans la chaleur estivale, la dépouille mal conservée, en état de décomposition avancée, est rapidement enterrée ou détruite : elle disparait de l’Histoire de France. Chastel, lui, s’est estimé grugé. Il n’a jamais touché les 9400 livres de récompense (l’équivalent de 100 chevaux de l’époque) mais n’a obtenu que 72 livres du diocèse. À partir de là, les attaques contre les humains cessent après que la louve et les louveteaux de ce loup furent tous tués. La Bête aura commis, en trois ans, plus de 150 victimes, dont environ 100 morts, 27 blessés et 49 attaqués (estimation de Jean Richard), et certains élèvent le nombre de victimes jusqu'à 250, avec 150 tuées et 70 blessées (estimation de Michel Louis)… en trois ans. 

 

Dès le XVIIIe siècle, les épisodes sanglants et mystérieux du Gévaudan font couler beaucoup d’encre. Depuis les premières sommes des abbés Pourcher (1889) et Fabre (1901), les travaux récents des chercheurs Jean Richard, Guy Crouzet, Bernard Soulier et Jean-Marc Moriceau ont profondément renouvelé une historiographie pléthorique et de qualité inégale. À partir du XXe siècle, l'énigme s'est concentrée sur la nature de la Bête et de nombreuses thèses souvent contradictoires ont surgi, sur ce que fut la Bête du Gévaudan. Les doutes persistent : était-ce un loup, une hyène, un ours, un singe, des fauves divers, un glouton, un thylacine, un loup de Tasmanie…un molosse dressé par un sadique, un tueur en série ou un complot... ou un être surnaturel ? Dès l’époque de l’affaire, certains ont toujours affirmé qu’il s’agissait d’un loup ou de loups anthropophages. Et les meilleurs chercheurs (Jacques Delperrié de Bayac, Gilles Ragache, Guy Crouzet, le chanoine Félix Buffière, François de Beaufort, Jean-Paul Chabrol, François-Louis Pelissier et Julien Benoit), les éthologues qui étudient le comportement des loups concluent qu’il n’y a pas une seule Bête, mais probablement trois, quatre ou cinq meutes de loups qui ont opéré en même temps sur ce vaste territoire. D’autre part, lorsqu’on fait l’histoire des loups en France, avec des preuves documentaires, on s’aperçoit qu’avant l’affaire du Gévaudan, c’étaient uniquement un ou des loups qui dévoraient les humains et principalement les enfants, les jeunes bergers ou les jeunes bergères. On a deux séries de preuves, l’historique des attaques de loup en France contre les humains et les travaux scientifiques qui montrent qu’exceptionnellement, dans des conditions qui sont difficiles à expliquer, environ 2 % des loups peuvent devenir, et c’est une énigme, anthropophages. Une certitude par contre, la Bête du Gévaudan n’est pas une légende et a mis le royaume de France sous tension et obligé Louis XV à employer des moyens fantastiques pour tenter de la débusquer. Selon Bernard Soulier, elle aurait pu être aussi un hybride de loup et de chien, ce n’était pas très courant mais ça pouvait exister. Un chien errant peut très bien s’accoupler avec une louve. Ce qu’on sait aussi, c’est qu’au XVIIIe siècle, certains chasseurs créaient des hybrides pour ensuite pouvoir chasser le loup avec ces animaux. Cette hypothèse sera reprise par Michel Louis mais détourné afin d’innocenter les loups. Mais, l’histoire d’un monstre qui ne serait pas un loup, même si elle circule dans le Gévaudan jusqu’en 1767, se développe surtout au XIXe siècle, avec les romanciers et certains historiens ou érudits. Certains disent que ce n’était pas un loup, il y a plusieurs hypothèses, ce qu’on appellerait aujourd’hui un serial-killer (le docteur Puech, Marguerite Aribaud-Farrère, Alain Decaux), un ensemble de meurtriers (André Aubazac), une Bête dressée spécialement pour dévorer les enfants (Gérard Ménatory, Michel Louis, Jean-Jacques Barloy, Raymond-Francis Dubois), un loup-garou (Pierre Cubizolles), un sorcier, un complot (Hervé Boyac, Roger Oulion, Marc Saint-Val), un ours (François Fabre), un animal exotique (François Fabre, Gérard Ménatory, Guy Crouzet, René de Chantal, Marc Saint-Val, Éric Mazel et Pierre-Yves Garcin, Michel Murger, Bruno Loisel), voire une hypothèse plus fantaisiste (Alex Marques, Pascal Cazottes, Jean-Claude Bourret, Pierric Guittaut)... C’est ce qu’on retrouve aujourd’hui encore sur Internet. Il y a toujours des gens qui affirment, sans en montrer les preuves, que ce n’était pas un loup

 

L’'histoire de la créature fascine toujours le public, on ne compte plus le nombre de romans comme La Bête du Gévaudan de Élie Berthet, La bête du Gévaudan d’Abel Chevalley, Histoire fidèle de la Bête en Gévaudan d’Henri Pourrat, La Bête du Gévaudan de José Féron Romano, Les Grandes Enigmes De L'Histoire: La bête du Gévaudan de Pascale Hédelin et illustré par Alban Marilleau, Le Chien de Dieu de Patrick Bard, Gévaudan de Philippe Mignaval, La bête de Catherine Hermary-Vieille, «Le carnaval des loups», écrit par Jean-Paul Malaval, Du Gévaudan à Versailles de Florence Metge, Gévaudan, C'était la bête de Alexandre Allamanche, Le Roman de la Bête de Gérard Roche, Les Contes interdits : La bête du Gévaudan de Bryan Perro, de bandes-dessinées comme La bête du Gévaudan de Jean-Louis Pesch, La Bestia de Adrien Pouchalsac et dessiné par Jan Turek, Le secret de la bête du Gévaudan par Jean-Claude Bourret et dessiné par Julien Grycan, «La Malbête», par Aurélien Ducoudray et le dessinateur Pierre-Yves Berhin, Les griffes de Gévaudan par Jean-Charles Poupard et le dessinateur Sylvain Runberg, des pièces de théâtre comme La Bête du Gévaudan, mélodrame, de M. Pompigny, musique de MM. Quaisain et Darondeau, et ballets de M. Millot, le 25 juillet 1809, La Bête en Gévaudan de Claude Alranq, «La Bête noire» par le dramaturge Jacques Audiberti ou encore la Bêtte du Gévaudan de François Sauvenot, et de films sur le sujet pour preuve un des plus gros succès du cinéma français, le film le “Pacte des Loups” de Christophe Gans en 2001 et des succès télévisuels comme La Bête du Gévaudan réalisé par Yves-André Hubert, diffusé le 3 octobre 1967 sur l'ORTF et du téléfilm «La Bête du Gévaudan», réalisé par Patrick Volson. La Bête inspire également les auteurs de mangas comme VanRah dans Stray Dog, tome 1 qui apportent une deuxième jeunesse à ce mythe vieux de 250 ans.  

 

Aujourd’hui, elle interroge aussi parce que le loup est de retour en France depuis le début des années 1990. Bien évidemment, on se pose des questions sur les loups, on a des attaques dans le Mercantour, en Lozère, en Haute-Provence… Il est normal que les gens qui s’interrogent sur le retour du loup mettent cela en relation avec les affaires précédentes, dont la plus célèbre reste la Bête du Gévaudan

 

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m’ont beaucoup aidé : Jacques Delperrie de Bayac, Du sang dans la montagne, Fayard, 1970, Xavier Pic, La Bête qui mangeait le monde en pays de Gévaudan et d’Auvergne, Albin Michel, 1971, Félix Buffière, La Bête du Gévaudan, Une grande énigme de l'histoire, chez l'auteur, 1987, Catherine Velay-Vallantin, Entre fiction et réalité. Le Petit Chaperon rouge et la Bête de Gévaudan, dans Gradhiva : revue d'histoire et d'archives de l'anthropologie, 17, 1995,  pp. 111-126, Henri Pourrat, Histoire fidèle de la bête en Gévaudan, Éditions Jeanne Laffite, 1998 (roman bien informé mais dont l’hypothèse est avant tout fictive), François Fabre (abbé) et Jean Richard, La Bête du Gévaudan, Clermont-Ferrand, de Borée, 2001, Pierre Pourcher, La bête du Gévaudan : véritable fléau de Dieu, Éditions Jeanne Laffite, 2006, Walton Ford, «Walton Ford», Musée de la chasse et de la nature, exposition du 15 septembre 2015 au 28 février 2016, et https://www.parisecologie.com/Archives/Evenements2015-16/ExpositionWaltonFord/ExpositionWaltonFord%202.htm, Charles-Éloi Vial, "La Bête du Gévaudan et ses archives", Revue de la Bibliothèque nationale de France, n° 56, 2018, p. 22-29, Jean-Paul Chabrol, Sur les traces de la Bête du Gévaudan, Editions Alcide, 2020, https://scerri6.wixsite.com/lartpenteur/single-post/ces-enfants-ch%C3%A9tifs-%C3%A9taient-une-proie-toute-d%C3%A9sign%C3%A9e-pour-la-b%C3%AAte-du-g%C3%A9vaudan, https://www.leveil.fr/puy-en-velay-43000/faits-divers/jean-paul-chabrol-aborde-les-facettes-de-cette-affaire-hors-norme-et-sensationnelle_12993711/, et https://www.objectifgard.com/actualites/gard-une-bete-divertissante-et-intelligente-17411.php, Jean-Marc Moriceau, La Bête du Gévaudan. Mythe et réalités, Tallandier, 2021, Gérard Lattier, La Bête, une histoire de la bête du Gévaudan, Dossier pédagogique de l’exposition du 30 septembre au 31 décembre 2022, Maison Rouge – Musée des vallées cévenole, septembre 2022, Paul Xavier, La bête du Gévaudan - Histoire et Énigme, Éditions les 3 colonnes, 2022, et Le procès de la Bête du Gévaudan n'aura pas lieu, Éditions les 3 colonnes, 2023 (roman bien informé), Riccardo Rao, Le Temps des loups : Histoire environnementale et culturelle d’un animal fabuleux, Éditions Universitaires d’Avignon, 2023, p. 193-215, Sylvain Runberg et Jean-Charles Poupard, Les Griffes du Gevaudan Tome 1, Glénat, 2024, https://archives.lozere.fr/expositions/salle-la-bete-du-gevaudan-le-loup-dans-les-campagnes-46/n:65, https://cortecs.org/wp-content/uploads/2016/01/CorteX_s21_21_Bete_Gevaudan_Arons_Satia_Use_Vallet-Simon.pdf, https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/haute-loire/pourquoi-la-bete-du-gevaudan-qui-a-tue-en-haute-loire-et-dans-le-cantal-passionne-t-elle-encore-de-nos-jours-2995088.html, https://francearchives.gouv.fr/pages_histoire/38726, http://lamouettehurlante.free.fr/interview/sylvain-runberg-les-griffes-du-gevaudan.html, https://sherpas.com/blog/bete-gevaudan/, https://www.archivesdepartementales.puy-de-dome.fr/archive/exposition/voir/14/22588, https://www.archivesdepartementales.puy-de-dome.fr/n/la-bete-du-gevaudan/n:19, https://www.bdzoom.com/192088/lart-de/%C2%AB-les-griffes-du-gevaudan-%C2%BB-t1-a-force-de-crier-au-loup/, https://www.ligneclaire.info/runberg-poupard-glenat-286560.html, et https://www.planetebd.com/bd/glenat/les-griffes-du-gevaudan/-/50169.html, http://ubaciis.free.fr/la-bete-chronologie.html, https://www.lhistoire.fr/livres/%C2%AB-la-b%C3%AAte-qui-mange-le-monde-%C2%BB, https://www.liberation.fr/cahier-special/2007/03/30/dans-les-pas-de-la-bete_88916/, https://www.lamontagne.fr/ruynes-en-margeride-15320/actualites/la-vie-rurale-en-gevaudan-au-xviii-e-siecle_14197656/, https://www.margeride-en-gevaudan.com/wp-content/uploads/2021/01/Brochure-Bete-du-Gevaudan-mairie-du-malzieu-ville.pdf, https://www-preprod.retronews.fr/echo-de-presse/2017/10/02/terreur-en-france-la-bete-du-gevaudan-attaque, et https://www.rtl.fr/culture/culture-generale/bete-du-gevaudan-attaques-mysteres-legendes-comment-ce-monstre-a-terrifie-la-france-7900461241.

 

Merci !

dimanche 29 juin 2025

Pierre et Paul, deux missions concurrentes et la fin de la fête des saints populaires au Portugal

Dans l'histoire de l'Église, Pierre est considéré comme le premier pape. Pourtant, rien ne le disposait à prendre la place du premier apôtre. Originaire d'une petite bourgade sans prétention située au nord de la terre d'Israël, il exerce humblement une activité de pêcheur avec son frère André et quelques amis qui lui sont associés. Alors que la région est dominée par l'Empire romain et que le judaïsme est en crise, le discours messianique de Jésus le séduit si bien qu'il décide de le suivre. D'après les évangiles, c'est Jésus qui donne à Simon le nom de Pierre. Il reçoit aussi la charge du "troupeau" : "Tu es Pierre, dit le Christ, et sur cette pierre je bâtirai mon Église". Pierre apparaît ainsi comme le porte-parole des disciples, et leur chef. Il occupe la première place. Personnage complexe, tiraillé entre son engagement et ses doutes qui le font renier Jésus après son arrestation. La résurrection du Christ dont il serait un des  premiers témoins avec Marie de Magdala et Jacques, le frère du Seigneur achève pourtant sa conversion : il devient alors le second de l'Église menée à Jérusalem par Jacques, le frère du Seigneur, mène une prédication réussie lors de la Pentecôte, puis surveille les communautés hellénistes comme celle de Samarie avec l’apôtre Jean qui n’ont pas respecté les accords avec les autorités religieuses et ont vu Étienne mourir en 36, voit l’arrivé de Paul de Tarse entre 38 et 39 dont la communauté se méfie, mais le laisse faire, car il est secondé par Barnabé, il évite de peu la mort entre 43 et 44 lors de la persécution d’Hérode Agrippa 1er contre les leaders chrétiens, et ouvre le christianisme au monde païen en convertissant Corneille, en intervenant lors du concile de Jérusalem (vers l’an 50) et en évangélisant une partie de l'Orient tout en dirigeant l’Église d’Antioche et en surveillant les activités de Paul de Tarse, se fâchant avec lui à propos du non respect des règles du concile de Jérusalem à Corinthe. Pierre achève son parcours à Rome, où la première communauté chrétienne apparaît vraisemblablement assez tôt, dès les années 40, où, il fut sans soute un «président» célébrant l’eucharistie (consécration et partage du pain et du vin en mémoire du dernier repas de Jésus, la Cène) et gérant l’aide sociale selon la tradition, et il est crucifié au moment des persécutions de Néron, après l'incendie de Rome en 64.

 

Le 29 juin, on fête aussi la Saint Pierre (São Pedro), également lors de fêtes populaires organisées dans différentes localités du pays, dans certaines villes de pêcheurs, comme c'est le cas à Sintra ou dans d’autres villes comme Évora, deux villes inscrites au patrimoine mondial. Des processions, des danses et des marches populaires s'organisent dans les rues, et la musique est omniprésente. Côté gastronomie, sardines grillées, poivrons, pain de maïs, caldo verde et vin sont les principaux ingrédients de la fête. D'ailleurs, Évora a la particularité de célébrer deux saints populaires; en effet, depuis le XVIe siècle, elle organise la foire de la Saint Jean, l'une des plus importantes de la région Sud du Portugal, et commémore aussi la Saint Pierre, jour férié municipal. Dans les villes côtières comme Póvoa de Varzim, les processions maritimes honorent Saint Pierre, le saint patron des pêcheurs, avec des bateaux décorés défilant le long du rivage. Pendant cette fête, c'est aussi la tradition de sauter par-dessus un feu de bois et d'offrir à l'élu(e) de son cœur des pots de basilic à l’odeur aromatique, ornés de petits papiers colorés sur lesquels sont écrits quelques vers bien souvent romantiques, vu que ces fêtes sont également associées au solstice d'été et à d’anciens rites de fertilité. Certaines villes célèbrent la fête municipale le jour de la Saint-Pierre, comme : Póvoa de Varzim, Sintra, Montijo, Évora, Castro Verde, São Pedro do Sul, Seixal, Macedo de Cavaleiros, Ribeira Grande, Felgueiras et Bombarral.

 

On fête aussi Paul de Tarse. Cet originaire de Tarse, un être qui resta attaché à ses origines juives faisant sans doute partie des élites provinciales, il vit un judaïsme engagé, il se passionne pour les débats, très ferme dans ses convictions, persécuteur de la communauté chrétienne primitive, il est devenu disciple de Jésus après la rencontre de Damas qui lui apporte une nouvelle richesse, se comportant au Ier siècle de notre ère en véritable entrepreneur religieux et il a sillonné l’Orient romain pour multiplier les noyaux de croyants. C’est un savant doué d’un sens évident de la communication, qui acquit une formidable maîtrise de l’espace politique romain. Pourtant, l’apôtre connut des échecs qui témoignent de l’autonomie des premières communautés chrétiennes. Les "voyages de Paul" évoluent avec le temps et l'apôtre y affermira sa réflexion. D’abord à Chypre et en Asie mineure comme second de Barnabé, ensuite comme principal envoyé en mission accompagné de nouveaux disciples dans une excursion plus lointaine en Grèce européenne (Thessalonique, Philippes, Athènes, Corinthe). À ce moment, Antioche est encore la base arrière de l'activité missionnaire de Paul, mais il est étroitement surveillé par la communauté de Jérusalem à cause de son enseignement hétérodoxe qui va l’encontre de celui de Jésus. À ce moment, Antioche est encore la base arrière de l'activité missionnaire de Paul. En vrai stratège, Paul a su composer avec les pouvoirs publics et répondre aux contestations des autres leaders ecclésiastiques, il réconforte les chrétiens de Thessalonique harcelés pour leur foi, il confie aux femmes en Église une place et un rôle qu'elles perdront rapidement ensuite, milite pour la place des pagano-chrétiens au concile à Jérusalem mais c’est l’Église de Jérusalem qui gagne en imposant la loi noachique, et également à Corinthe, où il se met en colère contre Pierre qu’il a trompé en ne respectant pas les règles du concile de Jérusalem, après l'incident et la querelle avec Pierre, Paul quitte définitivement Antioche pour Ephèse, nouveau centre de gravité de son activité missionnaire, et plaide chez les Galates en faveur de l'universalité du christianisme mécontent que les missionnaires de l’Église de Jérusalem rencontre du succès chez eux. Afin d’affermir ses communautés tentées par les communautés judéo-chrétiennes, sept épîtres (sur treize) attribuées réellement à Paul, toutes ont été rédigées (probablement par un collectif de fidèles, car écrire supposait alors un lourd travail de groupe, sans parler de la diffusion) autour des années 50, soit vingt ans avant le premier des quatre évangiles. Revenu à Jérusalem en 58, il est arrêté par les autorités du Temple et enfermé à Césarée par le procurateur Félix, puis il est envoyé à Rome vers 60 où il est en liberté surveillée, et il est probablement mort décapité autour de 62 à Rome par l’empereur Néron qui se débarrasse d’un chef de secte.

 

La Saint-Paul est célébrée durant ce mois des saints populaires. Durant cette période, les rues se décorent de couleurs et de basilic, avec des fêtes liturgiques et des pèlerinages organisés par l'Église.

 

Pour allers plus loin, je vous conseille ces lectures qui m’ont beaucoup aidé : Marie-Françoise Baslez, Saint Paul, ‎ Fayard/Pluriel, 2012, et https://www.persee.fr/doc/dha_0755-7256_1992_num_18_1_1998, Christophe Dickès, Saint Pierre : Le mystère et l'évidence, Paris, Perrin, 2021, et https://www.histoire-et-civilisations.com/thematiques/antiquite/saint-pierre-le-premier-pape-88032.php, Daniel Marguerat, Paul de Tarse : L'enfant terrible du christianisme, Seuil, 2023, https://www.histoire-et-civilisations.com/thematiques/antiquite/quand-les-eveques-de-rome-netaient-pas-les-seuls-papes-68826.php, https://www.la-croix.com/Religion/saint-pierre-apotre#voirplus, https://www.portobay.com/fr/blog-in-portobay/saints-populaires-au-portugal/, https://www.tourmag.com/Juin-le-mois-des-fetes-populaires-_a122760.html, et https://www.visitportugal.com/fr/content/fetes-des-saints-populaires.

 

Merci et bonne Saint Pierre et Saint Paul !

jeudi 26 juin 2025

Le Joueur de flûte de Hamelin, une légende sur fond de réalité

Ce conte a en fait survécu très longtemps. Issue du folklore médiéval, elle a inspiré un vers de Goethe, Der Rattenfänger; une légende des frères Grimm, Les Enfants de Hamelin; et l'un des poèmes les plus célèbres de Robert Browning, Le Joueur de flûte de Hamelin. Il existe peu de preuves de ce qui aurait pu se passer à Hamelin, une ville du nord de l'Allemagne. Un vitrail, réalisé vers 1300 et conservé jusqu'au XVIIe siècle dans l'église du Marché (Marktkirche), semble faire allusion à un événement où des enfants étaient en danger. Ce n'est qu'en 1384 que nous obtenons un récit plus précis, celui-ci tiré de la chronique de la ville. La brève mais inquiétante entrée de cette année-là indique : «Cela fait 100 ans que nos enfants sont partis.» Une autre référence provient d'une chronique latine de la ville allemande de Lunenberg. Bien que rédigée au XIVe siècle, cette chronique semble avoir ajouté une page de texte supplémentaire entre 1430 et 1450 ajoutant un beau jeune homme jouant d’une flute d’argent majestueuse flûte emmenant 130 enfants hors de la ville de Hamelin (Hameln en allemand), dans le nord de l'Allemagne qui le suivirent à l’Est puis disparurent et on ne trouva plus trace d’eux. Depuis les habitants comptent les années après la disparition de leurs enfants. Compte tenu de la date, le joueur de flûte aurait pu simplement les conduire à la fête de la Saint-Jean. Le récit fut évoqué à plusieurs reprises et copié à la fin du XVIe siècle. Les textes anciens ne faisaient aucune mention des rats, mais au fil du temps, l'histoire s'est développée : le joueur de flûte (vêtu de vêtements pie – ou colorés) réussit à débarrasser la ville d'une abondance de rats, mais emmena les enfants pour se venger du refus des habitants de le payer. Le nom allemand du personnage, Der Rattenfänger von Hameln, fait référence à cet aspect.

 

Le mystère du sort des enfants a donné lieu à de nombreuses recherches et théories. Dans son ouvrage de 2005, The Pied Piper: A Handbook, Wolfgang Mieder résume sept théories, tandis que le site web de la ville elle-même renvoie à une liste de dix-sept. Parmi celles-ci figurent le fait que les enfants se sont tués en dansant, phénomène d'hystérie collective connu sous le nom de danse de la Saint-Guy, une mort par peste, une croisade vers Jérusalem de 130 enfants d’Hamelin en 1212 conduite par Nicolas de Cologne, et plusieurs variantes de l'idée d'une émigration vers l'est dans le cadre d'une colonisation allemande plus vaste en Europe de l'Est puisque les noms de famille Hamelin commencent à apparaître avec une fréquence notable dans les nouveaux territoires allemands hors de Berlin. Les temps étaient durs, les gens étaient pauvres et ce musicien haut en couleur offrait des opportunités aux enfants et une bouche de moins à nourrir aux familles. Des documents attestent de l'utilisation de cette tactique en Allemagne à l'époque. La Transylvanie a notamment été suggérée comme destination finale, notamment par les frères Grimm dans leur Deutsche Sagen de 1816, ce qui a largement contribué à populariser l'histoire. Robert Browning fut l'auteur le plus important à avoir popularisé l'histoire du Joueur de flûte dans le monde anglophone avec son poème de 1842. Ce poème perpétue également l'idée que les enfants finirent par se retrouver en Transylvanie. Plus tard au XIXe siècle, le poème de Browning fut introduit dans le monde de l’édition commerciale dans une édition illustrée par Kate Greenaway.

 

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m’ont beaucoup aidé : Michèle Lefort, La verdadera historia del flautista de Hamelin, recréation, de Robert Browning et Samivel à Álvaro Mutis [article], dans América. Cahiers du CRICCAL 23, 199, pp. 161-173, https://eu.journalstandard.com/story/news/2021/01/04/moderow-moment-real-pied-piper-hamelin/4127799001/, https://languagecollections-blog.lib.cam.ac.uk/2024/03/19/the-mystery-of-the-pied-piper/, https://www.bbc.com/travel/article/20200902-the-grim-truth-behind-the-pied-piper, et https://www.medievalists.net/2023/06/pied-piper-abduction/.

 

Merci !

mardi 24 juin 2025

La Saint Jean, entre un prophète tonitruant et des fêtes joyeuses au Portugal

On célèbre aujourd’hui la naissance de Saint Jean-Baptiste. Mais en réalité, cette date, proche du solstice d’été, fête surtout l’arrivée des beaux jours. Un week-end synonyme de joie et de bonne humeur pour les Portugais.

 

Jean, d’une famille sacerdotale, abandonna la prêtrise, parce qu'il était de plus en plus convaincu que les autorités sacerdotales collaboraient avec Rome et de ses rois clients (les fils d’Hérode), il surgit alors et attire un large public sans doute vers 26 et devint le prophète ou le grand prêtre de la fin des temps qui inaugurerait le royaume de Dieu sur terre, à l’image du nouveau Moïse ou d’un nouveau Élie choisi par Dieu pour libérer son peuple. Par son ministère de baptême comme alternative aux sacrifices du Temple et moyen de réparer les péchés, il conduisit tous ceux qui venaient à lui, juifs comme non-juifs, dans cette nouvelle ère naissante attirant le peuple dans le désert et qui croyait que Dieu lui donnerait là des signes de délivrance et où se trouvaient les eaux libératrices comme celles du Jourdain, attirant envers lui l’inimitié des autorités sacerdotales et collaboratrices de Rome, car il prônait la restauration du culte et peut-être éventuellement du Temple et la délivrance de Rome et Hérodiens. Jean était un ami, le maître et le mentor de Jésus après son baptême (marquant l’entrée des disciples dans le mouvement du baptiste).  Jésus commença donc sa carrière en tant que disciple de Jean-Baptiste vers 27, il le seconda dans son travail de prédication en Judée, car ce dernier eut assez confiance en lui pour lui envoyer des disciples et le faire baptiser à son tour. Entre-temps, le fait que Jean fût suivi par la foule et son message apocalyptique devinrent des menaces politiques pour Hérode Antipas inquiet que ses soldats et ses collecteurs d’impôts adhèrent à son enseignement, et le fit arrêter en mars 28 et exécuter Jean en avril 29 prenant prétexte de ses critiques envers son concubinage avec Hérodiade, la femme de son frère Hérode Philippe, pour faire avorter tout mouvement révolutionnaire pensant le disperser craignant le forte qu’il exerçait influence sur ses adhérents, ce qui poussa Jésus à se retirer en Galilée en mars 28, non sans que Jean demanda à ses disciples de le suivre lorsqu’il se trouvait en prison, car il en fit son successeur. Outre son influence sur le christianisme, le judaïsme et l’islam, Jean est également vénéré par les Mandéens, qui se considèrent comme les fidèles disciples de Jean.

 

Saint Jean est le plus célébré à Porto, la deuxième plus grande ville du Portugal. La fête règne avec les mêmes couleurs et expressions de joie dans les quartiers les plus typiques, comme ceux de Miragaia, Fontainhas, Ribeira, Massarelos entre autres. La veille du 23 juin Porto se transforme en un immense festival en plein air. Une des traditions les plus singulières est de frapper joyeusement les gens avec des marteaux en plastique et des poireaux, une coutume censée porter chance. Les rues de la ville s'animent avec de la musique, des danses et des feux d'artifice. À Porto on lâche aussi des ballons à air chaud, lors d'une des plus belles célébrations de ces festivités populaires. Les rives du Douro sont remplies de personnes profitant des barbecues, et le point culminant est le spectaculaire feu d'artifice à minuit. Les touristes peuvent s'immerger dans la culture locale en participant aux fêtes de rue, en dégustant des plats traditionnels tels que le "caldo verde" (une soupe aux choux verts et chouriço) et les sardines grillées. Pour beaucoup de monde, la nuit se termine sur la plage, pour voir le lever du soleil ou prendre un bain matinal, comme l'exige la tradition. Pendant cette fête, c'est aussi la tradition de sauter par-dessus un feu de bois et d'offrir à l'élu(e) de son cœur des pots de basilic à l’odeur aromatique, ornés de petits papiers colorés sur lesquels sont écrits quelques vers bien souvent romantiques, vu que ces fêtes sont également associées au solstice d'été et à d’anciens rites de fertilité.

 

Du 17 au 24 juin, de nombreuses offres sont proposées à Braga, depuis le traditionnel défilé des "Gigantones" et des "Cabeçudos", les processions ethnographiques et historiques ou les processions religieuses, jusqu'aux concerts d'artistes nombreux et variés, qui rempliront les rues de musique et de couleurs, ou encore le très attendu spectacle pyromusical du 24. Nées en 1150, lors de la fondation d'une église dédiée à Saint-Jean dans la ville de Braga, les festivités ont connu leur propre évolution au fil des siècles, pour aboutir à ce qui est aujourd'hui les plus grandes fêtes de la ville de Braga, grâce à l'implication du conseil municipal et de l'association commerciale de la ville. L’un des points forts de São João est l’abondance de stands de nourriture de rue proposant des délices portugais traditionnels. Il faut se laisser tenter par les sardines grillées, le caldo verde (une soupe consistante), les bifanas (sandwichs au porc) et diverses sucreries comme les churros et les bolos de São João (gâteaux de la St-Jean).

 

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m’ont beaucoup aidé : Joel Marcus, John the Baptist in History and Theology, University of South Carolina Press, 2018, Nathan C. Johnso, "Early Jewish Sign Prophets.", dans James Crossley and Alastair Lockhart (eds.), Critical Dictionary of Apocalyptic and Millenarian Movements, 8 décembre 2021, James F. McGrath, Christmaker: A Life of John the Baptist, Eerdmans, 2024, et https://wordandway.org/2025/01/07/review-john-of-history-baptist-of-faith/, https://explorial.com/fr/decouvre-braga-10-faits-amusants-qui-te-surprendront/, https://www.portobay.com/fr/blog-in-portobay/saints-populaires-au-portugal/, https://www.tourmag.com/Juin-le-mois-des-fetes-populaires-_a122760.html, https://www.visitportugal.com/fr/content/fetes-des-saints-populaires, et https://www.visitportugal.com/fr/node/497991

 

Merci et bonne Saint-Jean !

dimanche 22 juin 2025

La fête du Saint-Sacrement, entre célébration médiévale et festivités portugaises

Depuis le XIIIe siècle, la célébration du Saint-Sacrement a lieu à l'occasion des visions d'une religieuse belge. Dès 1210, au cours de visions, Julienne de Cornillon avait reçu un appel à une plus grande vénération de l'eucharistie : le disque incomplet de la lune fut pour elle le signe que l'Église avait besoin de cette fête. À cette occasion, Dieu lui apparaît et lui exprime son désir de célébrer l'Eucharistie, une célébration initialement réservée à la Belgique. En 1264, le miracle de Bolsena provoqua la célébration du Corpus Christi dans le monde entier. Selon l'histoire, un prêtre qui ne croyait pas fidèlement à la transsubstantiation - le moment où des particules de farine se transforment en le corps de Jésus lui-même - aurait vu du sang couler d'une hostie, un fait qu'il aurait rapporté au pape. Suite à cet événement, la date fut fixée par le pape Urbain IV en 1264, et promulguée en 1317 au concile général de VienneLa célébration du Saint-Sacrement était un jour férié jusqu'en 2012, date à laquelle le gouvernement portugais a décidé de supprimer cette fête religieuse de la tradition catholique. Ainsi, à partir de 2013, la Fête-Dieu a cessé d'être un jour férié. Cependant, en 2016, la célébration a été à nouveau considérée comme une fête nationale.

 

Dans plusieurs localités du pays, des processions religieuses et des fêtes ont lieu ce jour-là. Les rues sont fleuries et, à certains endroits, des tapis de fleurs sont disposés au sol pour le passage du cortège. Ce jour-là, il est également courant que l’Église célèbre les premières communions et les communions solennelles pour les enfants et les jeunes. Cette année, la Fête-Dieu de Paços de Ferreira se déroule du 17 au 22 juin. Les six jours de fête promettent joie et divertissement aux visiteurs, avec des spectacles pour tous les goûts. La programmation musicale est de haut niveau. La Fête-Dieu de Monção, se déroule du 18 au 22 juin. Ces fêtes se distinguent par la communion parfaite entre le sacré et le profane, le point d'orgue étant la procession solennelle qui parcourt les rues de la ville, suivie du combat entre Coca (len dragon) et Saint Georges. On ne doit pas manquer pas l'occasion de profiter de la programmation culturelle variée, avec de nombreux spectacles de rue, pour découvrir les coutumes et traditions de la municipalité.

 

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m’ont beaucoup aidé : Fête-Dieu (1246-1996) : Vol. 1, Actes du Colloque de Liège, 12-14 septembre 1996. Vol. 2, Vie de sainte Julienne de Cornillon, A. Haquin, J.-P. Delville (eds), 1999, https://www.calendarr.com/portugal/corpo-de-deus/, https://www.visitportugal.com/pt-pt/content/festa-da-coca-de-mon%C3%A7%C3%A3o-%E2%80%93-corpo-de-deus-1, et https://www.visitportugal.com/pt-pt/content/festas-do-corpo-de-deus-1

 

Merci et bonne fête du Saint-Sacrement !

samedi 21 juin 2025

Le solstice d’été au Portugal, des fêtes traditionnelles

Le solstice d'été, qui a lieu aujourd'hui, jeudi 21 juin dans l'hémisphère nord, le soleil monte plus haut dans le ciel que pour tous les autres jours de l'année. À midi, le soleil se trouve exactement au-dessus de toute personne qui se tient au niveau du tropique du Cancer. Le soleil met aussi plus de temps à passer de l'est vers l'ouest lors du solstice d'été que pendant n'importe quel autre jour de l'année. Après le 21 juin, journée la plus longue de l'année, les jours vont raccourcir sous l'influence du changement des saisons. Et le solstice d’été donne au Portugal des célébrations festives.

 

Le 21 juin, ont peut participer à une promenade nocturne très spéciale dans le village de Sintra pour découvrir les secrets et les mystères que le village le plus charismatique du Portugal. L'objectif est de célébrer le solstice d'été avec style se mettant sur la célébration du solstice d'été s'appelait Litha, qui était le moment où chacun adressait ses prières au dieu Soleil. On se laisse alors guider par les arômes et les sons des montagnes de Sintra, qui nous mènent à l'endroit où se déroulera un rituel de célébration avec danse et musique, où il sera possible de déguster une potion magique, une boisson aphrodisiaque servie par une déesse celtique. Pour cette occasion, il y a bien sûr un code vestimentaire à respecter : porter des vêtements blancs, légers, frais et confortables. On recommande également des chaussures adaptées à la marche en montagne, une lampe de poche, de l'eau et un petit en-cas, comme une barre énergétique ou un sandwich. Une participation financière de 10 euro est souhaitée.

 

La mairie de Lagoa accueille aussi la 11e édition de Carvoeiro Noite Black & White en ce mois de juin. Cet événement, déjà inscrit au calendrier national, coïncide symboliquement cette année avec la célébration du solstice d'été, le jour le plus long de l'année, associé à la lumière, au feu et à la célébration de la nature. Inspirée de la tradition celtique de Litha, cette période de l'année où le soleil brille le plus longtemps sera marquée par des spectacles de danse du feu tribale et une performance vibrante du groupe de musique celtique Deira Band, promettant de plonger le public dans une atmosphère magique, empreinte de tradition ancestrale et d'esprit festif. Le noir et blanc est le code vestimentaire obligatoire, qui se reflète également dans les multiples expressions artistiques qui animeront la soirée : musique, danse, magie, cinéma et spectacles de rueCarvoeiro Noite Black & White est déjà une référence incontournable dans le programme culturel de l'Algarve et national, célébrant la musique, la culture et l'énergie de l'été, et transformant, pour une nuit, Praia do Carvoeiro en une scène d'expériences uniques et inoubliables.

 

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m’ont beaucoup aidé :https://www.cidadeecultura.com/origem-das-festas-juninas-historia/, https://www.cm-lagoa.pt/noticia-72/11-edicao-do-carvoeiro-noite-black-white-celebra-o-solsticio-de-verao-com-fogo-musica-celta-e-muita-animacao, https://www.nationalgeographic.fr/sciences/2018/06/solstice-dete-les-journees-terrestres-nont-jamais-ete-aussi-longues, https://www.som-direto.com/l/luz-musica-fogo-e-festa-carvoeiro-veste-se-de-preto-e-branco/, et https://www.tempo.pt/noticias/actualidade/na-noite-mais-longa-do-ano-danca-se-bebe-se-e-caminha-se-com-os-deuses-por-sintra.html.

Merci et bon solstice d’été !

jeudi 19 juin 2025

La Fête-Dieu, entre symbolisme et ferveur au Portugal

La Fête-Dieu est un Jour férié national au Portugal, célébré chaque année le 2e jeudi après le dimanche de Pentecôte donc entre le 21 mai et le 24 juin. En 2013, le gouvernement portugais supprime le jour férié correspondant au Corpo de Deus mais le rétablit en 2016. Ce jour est particulièrement important au Portugal : le Corpus Christi, également connu sous le nom de Corpo de Deus est une fête religieuse étroitement liée à la Foi catholique qui met en lumière le mystère de l'Eucharistie qui symbolise le sacrement du corps et du sang de Jésus-Christ.

 

En 1246, l'évêque de Liège, Robert de Thourotte, institue la Fête-Dieu afin que s'affermissent la dévotion et la foi en la présence du Christ à l'Eucharistie. Cette décision mit fin à une longue période de discussions sur l'opportunité de créer une nouvelle fête en vue de célébrer spécialement le sacrement du corps et du sang du Christ à l'Eucharistie. Dès 1210, au cours de visions, Julienne de Cornillon avait reçu un appel à une plus grande vénération de l'Eucharistie: le disque incomplet de la lune fut pour elle le signe que l'Église avait besoin de cette fête. Quelques années plus tard (1254), le pape Urbain IV promulguait la fête du Saint-Sacrement pour l'Église universelle. Au cours des temps, la réception de cette fête fut considérable en Europe mais aussi dans les pays colonisés par elle, spécialement en Amérique Latine. Le XIIIe siècle connut en grand élan de ferveur eucharistique spécialement dans les milieux religieux féminins (cisterciennes, béguines, recluses), et parallèlement dans la théologie savante, spécialement chez Thomas d'Aquin, qui du reste fut chargé de rédiger l'office romain de la fête.

 

Le Corpus Christi est une journée dédiée aux processions et aux festivals religieux dans tout le pays. Les rues des villes et des villages portugais se parent de décorations festives et de tapis de fleurs colorés, créant une atmosphère empreinte de spiritualité et de ferveur. Les processions du Corpus Christi sont des moments solennels où les fidèles catholiques défilent dans les rues en portant des ornements religieux, tels que des croix, des icônes et des statues représentant Jésus-Christ. Ces processions sont souvent accompagnées de chants, de prières et de manifestations de dévotion. Les festivals religieux qui accompagnent le Corpus Christi offrent également l'occasion de célébrer la richesse de la culture portugaise. Les danses traditionnelles, les représentations théâtrales et les manifestations artistiques sont courantes lors de ces festivités. Les costumes colorés, les danses folkloriques et la musique envoûtante créent une ambiance joyeuse et animée, tout en rappelant l'importance de la foi et de la tradition dans la société portugaise. Le Corpus Christi est donc une journée où la spiritualité, la tradition et la culture se mêlent harmonieusement. Elle permet aux Portugais de se réunir, de partager leur foi et de célébrer l'Eucharistie dans un esprit de communauté et de dévotion. C'est également l'occasion de rendre hommage à Jésus-Christ et de renouveler les promesses de foi et de communion avec Dieu. Ce jour-là, il est également courant que l’Église célèbre les premières communions et les communions solennelles des enfants et des jeunes.

 

Pour aller plus loin, je vous mets aujourd’hui ces lectures  qui m’ont beaucoup aidé : Fête-Dieu (1246-1996), 1. Actes du Colloque de Liège, 12-14 septembre 1996 édités par André Haquin; 2. Vie de sainte Julienne de Cornillon, édition critique par Jean-Pierre Delville (coll. Publications de l'Institut d'Études Médiévales de l'Université Catholique de Louvain - Textes, Études, Congrès, vol. 19/1 et 19/2), 1999, https://www.calendarr.com/portugal/corpo-de-deus/, et https://www.luisa-paixao.com/blogs/la-vie-au-portugal/quels-sont-les-jours-feries-au-portugal.

 

Merci et bonne Fête-Dieu !

Qu'allons nous voir ici ?

Ce blog s'intéressera avant tout à la question de l'historicité du roi Arthur durant les Dark Ages, une période de grands changeme...