Le 18 février 1519, Hernan Cortès quitte Cuba à la tête d’une flotte de onze navires
qui emmènent seize cavaliers, 518 fantassins, 32 arbalétriers, 13
arquebusiers, 110 marins, 200 auxiliaires amérindiens, une
dizaine de canons de bronze et une trentaine de chevaux, les premiers à fouler
le sol d’un continent qui n’en avait encore jamais vu. Trente mois plus tard,
l’empire aztèque ne sera plus qu’un
souvenir.

Originairement nomades et guerriers, les
Aztèques se sont progressivement
insérés dans le creuset des peuples sédentaires de la vallée de Mexico. Les
premières pierres de Tenochtitlan sont ainsi posées au début du XIVe
siècle. Les Mexicas ne sont alors
qu’un peuple parmi tous ceux que comptent ces hautes terres du Mexique central,
fédérées autour des langues nahuas ou
«auto-aztèques», qui s’établit vers
le XIe siècle dans la «plaine»
centrale du Mexique, en réalité un bassin clos déjà occupé par de nombreuses communautés sédentarisées.
Venus d’un nord sauvage en pratiquant les razzias, ces guerriers se mettent
alors à cultiver le maïs à la manière des populations de cette zone fertile
entourée de montagnes, qui a déjà connu plusieurs
royaumes puissants (Cuicuilco et
Teotihuacan). L’une des
particularités de leur implantation est la création des "chinampas", des parcelles d’agriculture hors-sol autour
de la capitale, qui leur permettaient de se nourrir. L’hégémonie des Mexicas sur les autres peuples nahuas
est construite sous la direction des rois
Huitzilihuitl, Chimalpopoca, Itzcoatl et Moctezuma l’Ancien. Elle s’appuie sur la maîtrise des ressources
des marécages (poissons, mollusques, gibier, insectes, algues, cultures des
jardins aquatiques), négligées par les autres peuples de cultivateurs. Leur
exploitation favorise le développement d’une société stratifiée, associant une
noblesse de guerriers et de prêtres à une population laborieuse. Moins liée aux
cycles agricoles, elle rend les hommes
disponibles au combat tout au long de l’année et permet par conséquent la
spécialisation des Mexicas dans
l’activité guerrière mercenaire. Longtemps,
la cité se trouve d’ailleurs sous la domination de la capitale tépanèque Azcapotzalco, au point d’apparaître
comme un «État-lieutenant». Sur le
plan politique, un triumvirat
constitué autour de trois cités
lacustres contrôle les vallées centrales pendant plusieurs décennies. L’ensemble
des peuples nahuas pratiquent
l’esclavage et la polygynie (Cas particulier de la polygamie, dans lequel un homme peut avoir plusieurs épouses), qui sont au centre du système international :
l’esclave est le butin de la guerre extérieure, l’échange des épouses scelle les pactes d’alliance,
leur délaissement équivaut à une déclaration de guerre… Sous l’égide du grand
chef (huey tlatoani) Moctezuma Ier, Tenochtitlan tire bientôt son épingle
du jeu et finit par imposer son hégémonie sur l’ensemble du Mexique central au cours du dernier
tiers du XVe siècle. Accédant au pouvoir, ils ont alors reconstruit
leur passé pour justifier leur domination sur la Méso-Amérique.

L'Empire
aztèque atteint son apogée au tournant des XVe et XVIe
siècles, à la veille de la conquête espagnole finalisée en 1521. Vis-à-vis des peuples, le pouvoir mexica s’appuie en outre sur une véritable politique de
terreur : les populations qui
opposent une résistance coriace sont anéanties pour l’exemple et le rituel du
sacrifice humain organise l’élimination des prisonniers de guerre. La guerre extérieure permanente, enfin,
s’impose comme le prix à payer pour entretenir le train de vie de la classe dirigeante et son autorité sur
l’ensemble des peuples en son
pouvoir. L’apogée
de la domination mexica se situe
dans notre XVe siècle et déploie une culture originale dont le
souvenir a été conservé à l’écrit par les générations postérieures. À côté de
la polygynie, les pratiques
homosexuelles organisent en partie la sociabilité
masculine. Au centre de la ville, formée par la fusion des premiers villages, s’élève la pyramide
dédiée au dieu souverain (Huitzilopopochtli),
flanquée du sanctuaire du dieu de la pluie (Tlaloc) et du palais royal. Chef d’œuvre d’un système hydrique
remarquablement sophistiqué, un aqueduc porte l’eau sur l’île en enjambant le
lac qui la sépare de la rive. Il contribue à alimenter un réseau de jardins
chatoyants offrant en spectacle une profusion de fleurs et ornés d’oiseaux
colorés placés dans des cages. Un zoo
expose les bêtes sauvages offertes en hommage par les communautés clientes des Mexicas.
L’abondance du lieu en ressources animales et végétales alimente une
gastronomie particulièrement variée et des festins que vient conclure la
boisson de chocolat. À
la veille de la conquête espagnole, Moctezuma
le Jeune s’attache à mettre en place une administration rationnalisée et à
concevoir ainsi un véritable appareil
d’État : provinces, gouverneurs
et garnisons garantissent l’activité
économique, le prélèvement fiscal et le règlement des litiges. Les Mexicas sont donc au sommet de leur
puissance lorsque les Espagnols
débarquent en territoire maya, une première fois en 1518, puis en 1519. Ces étrangers ne sont pas totalement
inconnus des Mayas, qui ont déjà
rencontré (voire capturé) des Européens
isolés.

Les Aztèques dominaient alors avec éclat la plus grande
partie du Mexique quand les conquérants espagnols y pénétrèrent en 1519. Leur
langue, le nahuatl, leur religion
s'étaient imposées dont l’une des pratiques rituelles étaient les sacrifices
humains qui de manière rituelle, étaient ainsi organisées des guerres dites «fleuries», «sorte de Jeux olympiques» ayant pour objectif de capturer des combattants ennemis, dont le sang
épanché depuis le sommet du Grand Temple (Templo Mayor) abreuvait un panthéon syncrétique, et où le culte
des divinités parmi lesquelles
figurent en bonne place Huitzilopochtli,
le dieu de la guerre et du soleil, Chicomecoatl,
la déesse de la fertilité et du maïs, ou encore Tlaloc, le dieu de l’eau et de la pluie, également honoré par les Mayas, y est essentiel, c'est aussi
l'une des sources principales de production artistique avec des matériaux de
grande valeur : pierres, coquillages, métaux précieux comme l'or bien entendu,
de l'Atlantique au Pacifique et des steppes du nord au Guatemala, sur
d'immenses étendues. Chez les Aztèques,
celui tout en haut de la pyramide est l’Empereur,
puis l’on trouve les nobles, appelés
"Pilli". Enfin, le reste
des Aztèques constitue les "Macehualtin". L’on trouve
aussi des "Mayeques", paysans soumis à un seigneur dont ils
entretiennent les terres. Le nom de leur souverain Motecuhzoma était vénéré ou craint d'un bout à l'autre de ce
territoire. Leurs commerçants
parcouraient le pays en tous sens avec leurs caravanes de porteurs dont
la principale activité est un commerce qui reposait principalement sur la
culture du maïs. Les communautés nahuas
(altepetls) étaient liées par des alliances interethniques complexes et très
instables, du fait de la polygynie régnante : polygames, les chefs (tlatoanis) avaient des progénitures
très nombreuses. Aussi les luttes de clans et les conflits fratricides
étaient-ils particulièrement récurrents. Néanmoins, aucune cité ne disposait d’armées permanentes. En fonction de la
saison, les hommes se faisaient tour
à tour cultivateurs ou soldats. Les femmes, sont à la fois cantonnées dans des foyers polygames, spécialisées dans certaines fonctions
productives, actives dans certaines situations de guerre, parfois chargées de
la police des marchés, parfois prostituées
sur les mêmes marchés…Leurs fonctionnaires percevaient partout
l'impôt. Aux frontières, les garnisons
aztèques tenaient en respect les populations
insoumises. À Tenochtitlán
(Mexico), leur capitale, l'architecture et la sculpture avaient pris un essor
extraordinaire, tandis que se développait le luxe du vêtement, de la table, des
jardins, de l'orfèvrerie.

À l'arrivée des Espagnols en 1519, l'empire,
même pas centenaire, est à son apogée. Quand les Espagnols découvrent Tenochtitlan,
ils sont ébahis. La ville est une métropole flottante de 200 000 habitants au milieu d'un lac bordé par de nombreuses
grandes villes. Les richesses de la capitale sont sans commune mesure avec tout
ce que les Européens connaissent. La
ville dépasse l'imagination. Même les comparaisons avec Paris (alors plus
grande ville d'Europe) n'y suffirent pas. La «Venise du nouveau monde» faisait rêver. Après une guerre gagnée de
justesse (à 200 contre 40 000), les Espagnols
asséchèrent le lac, détruisirent la capitale des Mexicas et créèrent la ville de Mexico qui devint capitale du Mexique,
le pays des Mexicains. Contrairement
à ce que l’on a longtemps considéré, la civilisation
aztèque a su s’adapter et développer des technologies nouvelles pour
survivre à l’invasion espagnole. Certains s’engagent à
leur tour dans l’œuvre de l’Église, voire dans la mission d’évangélisation
d’autres terres inconnues, au Nouveau Mexique, au Japon, dans les Philippines…
Parmi eux, certains contractent le goût de
l’histoire. Formés au latin, à
la doctrine catholique, au droit espagnol, mais aussi à
l’art de méditer le passé dans la tradition méditerranéenne d’Hérodote et de Tite-Live, des érudits
indigènes à l’instar de don Domingo
de San Anton Muñon Chimalpahin Quauhtlehuanitzin fixent le souvenir du monde mexica «des origines jusqu’à nos jours», c’est-à-dire avant sa découverte
par les Européens. Sous leur plume,
une histoire des «Aztèques»
n’a pas été écrite par les vaincus,
mais par leurs petits-fils.
Pour aller plus loin, je vous conseille
ces lectures qui m’ont beaucoup aidé : Danièle Dehouve, Essai sur
la royauté sacrée en république mexicaine, CNRS Éditions, 2004, Jacques Soustelle, Les Aztèques, Presses
universitaires de France, 2020, Camilla
Townsend, Le cinquième soleil :
une autre histoire des Aztèques, Albin Michel, 2023, https://laviedesidees.fr/Camilla-Townsend-Le-cinquieme-soleil, https://www.nonfiction.fr/article-11895-les-azteques-vus-par-eux-memes.htm, et https://www.sciencesetavenir.fr/decouvrir/livres/livre-l-histoire-des-azteques-racontee-par-eux-memes_176940, Mexica : Des dons et des dieux au
Templo Mayor, Musée du Quai Branly, Paris, du mercredi 03 avril 2024 au
dimanche 06 octobre 2024, https://www.geo.fr/histoire/quelles-sont-les-differences-entre-les-mayas-les-incas-et-les-azteques-202696, https://www.ouest-france.fr/leditiondusoir/2021-07-20/tenochtitlan-la-cite-des-maitres-de-leau-8f2038d6-41a9-4734-aa47-6e35d75e0a8f, et https://www.slate.fr/story/207155/histoire-origines-civilisation-azteques.
Merci !
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